La condamnation pour crime ou délit contraire aux moeurs d'un agent exerçant dans un établissement scolaire

roze-bruno Par Le 18/04/2018 1

Par un arrêt n° 17NT02889 du 23 février 2018, la cour administrative d’appel de Nantes est venue rappeler que les personnes condamnées pour crime ou délit contraire à la probité et aux mœurs ne peuvent être employées par un établissement d’enseignement primaire ou secondaire.

La cour vient préciser que cette condition posée à l’emploi d’une personne doit pouvoir se vérifier tout au long de son activité au sein de l’établissement. Autrement dit, l’absence d’une telle condamnation n’est pas qu’une condition d’accès à la fonction. Si l’agent est condamné après son entrée au service d’un établissement scolaire, il doit être radié des cadres (si c’est un fonctionnaire) ou licencié (si c’est un agent contractuel).

Elle estime, comme d’autres juridictions avant elles que cette condition institue une « incapacité de plein droit » (CAA Versailles, 2 novembre 2006, n° 05VE00120 ; CAA Bordeaux, 8 mars 2011, n° 10BX01886). C’est la raison pour laquelle certaines juridictions précisent que l’administration se borne à « prendre acte » de l’impossibilité pour la personne de continuer à exercer (CAA Paris, 3 avril 2014, n° 13PA00415).

Ainsi, l’agent condamné pour un crime ou un délit contraire à la probité et aux mœurs sera automatiquement exclu du service.

La cour précise que l’administration n’a donc pas à mettre préalablement fin à ses fonctions avant de le radier des cadres.

Elle rappelle également que cette décision n’est pas une sanction mais une mesure à caractère préventif qui vise à protéger la sécurité des élèves (CE. SSR. 4 avril 2012, M. Serge A, n° 356637). Par conséquent, l’administration n’a pas à respecter la procédure applicable en matière disciplinaire.

La cour ajoute que ce type de décision n’étant pas une sanction, le juge n’a pas à contrôler le caractère proportionné de la mesure.

En effet, les sanctions infligées aux agents doivent être proportionnées aux fautes de ce dernier (CE. Ass. 13 novembre 2013, M. Dahan, n° 347704, publiée au Recueil). La radiation d’une personne ayant commis un crime ou un délit contraire à la probité ou aux mœurs n’étant pas une sanction – mais une obligation légale pour l’administration – le juge ne contrôle pas son caractère proportionné.

Se pose néanmoins la question des garanties accordées aux agents qui font l’objet d’une telle décision.

En effet, la circonstance que ce type de décision ne soit pas une sanction ne signifie pas pour autant que l’agent n’a aucune garantie.

Or, sur ce point, la jurisprudence paraît contradictoire. Certaines cours administratives d’appel avaient initialement jugé que l’administration était en situation de compétence liée pour radier l’agent de la fonction publique et en avaient déduit que tous les moyens de procédure dirigés contre ces décisions étaient inopérants (CAA Versailles, 2 novembre 2006, n° 05VE00120, précité ; CAA Bordeaux, 8 mars 2011, n° 10BX01886, précité). Cette position renvoie à la jurisprudence classique en vertu de laquelle lorsque l’administration est en situation de compétence liée pour agir (autrement dit qu’elle n’a aucun choix et aucune marge d’appréciation sur la conduite à tenir), les moyens de procédure et de forme dirigés contre cette décision sont inopérants (CE. Sect. 3 février 1999, M. Montaignac, n° 149722, publiée au Recueil).

Cependant, cette position a été remise en cause par d’autres arrêts plus récents dans lesquels il est considéré que si l’administration n’a effectivement aucun choix une fois qu’elle a considéré que l’agent a été condamné pour un crime ou délit  contraire à la probité ou aux mœurs, elle procède bien, en amont, à une appréciation des faits et à leur qualification. En effet, l’administration doit se pencher sur la condamnation pour déterminer si elle est contraire à la probité ou aux mœurs, toutes les condamnations n’étant pas forcément contraires à la probité ou aux mœurs (par exemple : un homicide involontaire dans le cadre d’un accident, etc.).

Dans ces conditions, selon la cour administrative d’appel de Paris, l’administration n’est pas en situation de compétence liée au sens de la jurisprudence  M. Montaignac (puisqu’elle apprécie le caractère du crime ou du délit commis), de sorte que les vices de procédures sont opérants contre ces décisions.

La cour en a déduit, d’une part, que ces décisions – qui sont défavorables et sont prises en considération de la personne – doivent être motivées en droit et en fait (CAA Paris, 24 septembre 2013, n° 11PA05024) et, d’autre part, doivent être précédées de la possibilité pour l’agent de consulter son dossier (CAA Paris, 3 avril 2014, n° 13PA00415, précité).

Par conséquent, l’agent conserve – selon la cour administrative d’appel de Paris – un minimum de garanties même si la décision n’est pas une sanction.

Néanmoins, l’on ne peut être certain que cette position sera suivie à l’avenir par d’autres juridictions eu égard à la contradiction des cours entre elles et à l’absence de position prise par le Conseil d’Etat sur cette question.

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Commentaires

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