Le contrôle des refus de master par le juge

Le contrôle, très « restreint » sur les mérites du candidat pour les refus d’admission en master

Le 16/05/2025

Il est opportun de souligner que si les juridictions administratives examinent, dans leur ensemble, les conditions dans lesquelles la sélection à l’entrée en master est organisée, en revanche, elles semblent ne pas vouloir contrôler l’appréciation des universités sur les mérites du candidat à l’occasion d’un refus d’admission en master.

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Plusieurs rappels s’imposent ici.

  • Les refus de master n’ont pas à être motivés

Les refus d’admission en master sont nombreux (voir les articles : L’entrée en master 1 peut désormais être, légalement, sélective ; Quels recours en cas de refus de masters ?) et les exigences de motivation (donc d’explication) des refus sont particulièrement légères (voir l’article : La motivation des décisions de refus d’admission en master).

Dans la pratique, les universités se bornent à alterner entre une ou deux phrases stéréotypées qui sont les mêmes pour tous les étudiants.

Cela ne permet donc pas en réalité aux étudiants d’en savoir plus même s’ils peuvent en principe demander les raisons précises du rejet de leurs candidatures (article D. 612-36-2 du code de l’éducation).

  • Le contrôle théorique exercé par le juge sur les refus de master

Théoriquement, les juridictions administratives exercent un contrôle d’erreur manifeste d’appréciation sur les mérites de l’étudiant, candidat en master.

Pas de principe de souveraineté

En effet, à la différence des décisions prises par les jurys en matière d’ajournement qui sont couvertes par le principe de souveraineté du jury (voir l’article : Comment contester son ajournement à l’université ?), les décisions de refus d’admission sont soumises au contrôle du juge.

Plus précisément, le Conseil d’Etat juge de longue date que les jurys sont souverains dans la fixation des notes ou le classement à un concours (ex : CE. SSR. 12 février 1988, n° 85304, mentionnée aux tables ; CE. SSR. 12 décembre 1994, n° 135460 et s., mentionnée aux tables ; CE. SSR. 22 juin 2011, n° 336757, mentionnée aux tables ; CE. Sect. 4 octobre 2012, n° 347312, publiée au Recueil ; CE. CHR. 24 novembre 2017, n° 399324, mentionnée aux tables).

Mais cette souveraineté, qui signifie que le juge administratif n’exerce aucun contrôle sur l’appréciation portée, ne concerne que les jurys d’examen ou de concours.

En revanche, s’agissant des admissions en master, pour lesquelles le président ou la présidente d’université est compétent, il n’y a pas cet obstacle du jury. Ce qui signifie que le juge exerce en principe un contrôle.

Un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation

Le contrôle que le juge administratif a décidé d’exercer sur les refus de master est un contrôle « d’erreur manifeste d’appréciation », ce n’est pas un contrôle « normal ».

Il faut préciser que le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation (ou EMA) veut dire que le juge ne censure le raisonnement de l’administration que s’il est grossièrement erroné. Il ne le censure pas dès lors que son analyse est différente.

Ce choix du contrôle de l’EMA sur les décisions de refus de master ressort des rares décisions de cours administratives d’appel rendues dans ce domaine (CAA Nancy, 28 novembre 2024, n° 21NC02978 ; CAA Toulouse, 17 octobre 2023, n° 23TL00959 ; CAA Lyon, 30 juin 2022, n° 21LY00235 ; CAA Paris, 26 novembre 2021, n° 20PA02625).

Même si le Conseil d’Etat n’a pas tranché la nature de ce contrôle, celui-ci peut être regardé comme acquis étant donné l’unanimité des juridictions d’appel.

  • Le contrôle est particulièrement « restreint »

Mais dans la pratique, le contrôle va même probablement en-deçà d’un contrôle classique de l’EMA sur les refus de master.

En effet, les juridictions administratives ont particulièrement peu envie de s’immiscer dans la gestion de universités (et surtout souhaitent éviter un afflux des recours).

Aussi, leur raisonnement est généralement assez bref sur ce moyen et elles se contentent de rappeler la sélectivité du master, le nombre de candidat pour le nombre de place ainsi que, parfois, un ou deux éléments sur l’étudiant en question (voir les décisions citées supra).

Cette motivation des arrêts de cour administrative d’appel montre donc une volonté de laisser au maximum ce débat de côté.

Dès lors, il apparaît peu probable, même si d’autres moyens existent contre les décisions de refus d’admission en master, que ce moyen-là en particulier puisse sérieusement permettre une annulation.

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Bruno Roze

Avocat associé

Melian Avocats AARPI