Par une ordonnance n° 440391 du 28 mai 2020, le Conseil d’Etat estime, comme il l’avait fait précédemment, que le retrait d’un décret de naturalisation pour fraude ne crée pas de situation d’urgence.
En effet, dans cette affaire était en cause le retrait d’un décret de naturalisation pour fraude, au motif que la requérante aurait obtenu, antérieurement à sa naturalisation, des titres de séjour par fraude du fait d’une reconnaissance de complaisance.
Face au retrait de son décret de naturalisation, l’intéressée avait formé un référé « suspension » sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, qui permet, en cas d’urgence, d’obtenir une décision rapide du juge des référés sur la légalité apparente de la décision de l’administration.
Mais dans l’ordonnance commentée, le Conseil d’Etat refuse de se prononcer sur le retrait du décret de naturalisation.
Il estime que, dans la mesure où la décision de retrait de la naturalisation « n'implique pas, par elle-même, que les intéressées soient privées de tout droit au séjour sur le territoire français », il n’y a pas d’urgence à ce qu’il se prononce.
En effet, le retrait de la naturalisation n’empêche pas obligatoirement d’obtenir un titre de séjour même si cela arrive dans certaines hypothèses. Dès lors, le Conseil d’Etat considère que le décret de retrait de la naturalisation ne crée pas de situation d’« urgence » au sens du référé.
Cette position n’est pas nouvelle car le Conseil d’Etat a déjà considéré par le passé que le retrait de la naturalisation ne créait pas de situation d’urgence : CE. Ord. 28 novembre 2017, n° 415482 ; CE. Ord. 5 juillet 2016, n° 400590.
Dès lors, au vu de la réitération de cette position, il faut considérer qu’en principe, le retrait d’un décret de naturalisation ne crée pas de situation d’urgence. De la sorte, il est nécessaire de passer par une procédure au fond (plus longue) pour contester ce retrait.
Cependant, cela ne signifie pas que dans des hypothèses très particulières, l’urgence pourrait être reconnue. Dans l’ordonnance n° 415482 du 28 novembre 2017, le Conseil d’Etat prenait d’ailleurs bien soin de vérifier que la requérante ne devenait pas apatride du fait du retrait de sa naturalisation. Cela laisse donc supposer qu’à l’inverse, si le retrait d’un décret de naturalisation rendait le requérant apatride, cela pourrait conduire à regarder la condition d’urgence comme étant remplie.